Jacques ROSET, vétérinaire adhérent, nous raconte la semaine du 5 au 8 octobre 2015, où le Docteur Michaël CRANE et la comportementaliste Alison BECK sont venus à Ambert faire une formation « piqûre de rappel » aux soigneurs du Refuge. Tous leurs conseils seront utiles à nos adhérents. Le DONKEY SANCTUARY est un refuge anglais de réputation mondiale.
C’est avec plaisir qu’avec mon épouse, nous avons retrouvé Michaël Crane, vétérinaire du Donkey Sanctuary. C’est lui qui nous avait accueillis il y a une douzaine d’années à Sidmouth et avait consacré deux jours pour nous montrer et nous expliquer la formidable organisation mise en place en matière d’accueil, de recherche, de mise en pratique, de soins et des études de comportement des ânes. Il est, assurément, de part son implication au niveau mondial, une compétence reconnue dans le monde des ânes avec tout le travail qu’il a pu effectuer au Donkey Sanctuary, mais aussi sur le territoire africain. Il était accompagné d’Alison Beck, plus spécialisée sur le comportement des ânes et les rapports homme/animal.
Forts de leurs connaissances scientifiques et pratiques, ils sont venus assurer une formation à nos soigneurs plus ou moins expérimentés, en apportant une méthodologie de connaissance générale sur l’âne, aussi qu’une méthodologie d’observation et de suivi de nos ânes.
Je me suis bien retrouvé dans leur approche, puisque maintenant depuis de longues années, j’écris dans « l’Âne Bleu » des articles de vulgarisation pratique m’appuyant sur mon expérience professionnelle et mon expérience de propriétaire d’ânes.
Michaël Crane et Alison Beck sont de vrais professionnels de la formation qui ont mis en place des méthodes simples, pragmatiques pour appréhender d’une manière raisonnée ce qui doit être une bonne observation du comportement de l’âne, de sa morphologie et donc d’être rapidement alerté sur des problèmes que l’âne peut cacher, en particulier par son endurance et son stoïcisme. Sur cela, je vous ai souvent écrit : l’âne ne manifeste pas facilement son problème, c’est une des différences avec le cheval. Après avoir fait une présentation générale sur l’âne, dans l’histoire, sa présence actuelle, son utilisation et son comportement, sur laquelle je ne m’étendrais pas, il a été question de rentrer dans une méthodologie concrète avec présentation de fiches et de schémas pour l’observation générale et puis plus détaillée. Également, il a été présenté des listes d’observation, de vérifications quotidiennes et de suivi individuel.
Fiches et schémas qui permettent l’évaluation corporelle
Ils ont particulièrement insisté sur l’évaluation corporelle qui doit faire réagir à la fois en cas de maigreur et d’obésité par une observation plus poussée, alimentaire et sanitaire.
Suivant le résultat, il faut dans les cas limites, repenser le régime alimentaire et pratiquer des examens médicaux : dentition, état parasitaire, etc…L’intervention d’un vétérinaire étant alors indispensable pour mettre en place un protocole de soins appropriés.
Ce schéma de l’âne permettra de mieux comprendre les principaux points anatomiques à vérifier visuellement et au toucher.
Les processus épineux sont les points osseux montants de l’épine dorsale. Le muscle supra-épineux se situe le long de chaque côté de l’épine dorsale.
On reconnaît :
– un âne très maigre quand la structure osseuse est facilement visible sur le corps ; peu de muscle présents, animal faible, léthargique.
– un âne maigre est émacié : les côtes, les crochets (tubérosité coxale) et les pointes de la hanche (tubérosité ischiale), les lames et l’épine de l’omoplate sont saillantes et ont des contours pointus et bien définis ; un certain développement musculaire ; cou maigre ; garrot saillant ; épaules anguleuses.
– un âne modérément maigre a la colonne vertébrale saillante et les processus épineux individuels peuvent être senties au toucher ; peu de graisse, mais le muscle supra-épineux est visible au dessus des processus épineux ; les côtes, les pointes (tubérosité ischiale) et les crochets (tubérosité coxale) de la hanche sont saillants ; région lombaire et croupe concaves ; peu de muscles ou de graisse couvrent les épaules et le garrot.
– un âne « modéré » a la colonne vertébrale visible ; les pointes de la hanche (tubérosité ischiale) peuvent être sentis au toucher mais ne sont pas visibles ; les crochets (tubérosité coxale) de la hanche sont arrondis mais visibles, croupe plate plutôt que concave ; les côtes peuvent être senties au toucher mais ne sont pas visibles ; le garrot, les épaules et le cou ont un peu de muscle recouvert de gras ; les lames de l’omoplate sont moins bien définies.
– un âne en très bonne forme (plus que modéré), a des muscles supra-épineux développés et apparents, la colonne vertébrale peut être sentie au toucher ; les crochets (tubérosité coxale) de la hanche sont arrondis ; la croupe est arrondie et convexe ; les pointes (tubérosité ischiale) de la hanche non visibles ; un peu de graisse peut être sentie au niveau des épaules et à la base du cou ; on peut sentir les côtes mais elles ne sont pas visibles.
À un âne en très bonne forme (plus que modéré), on ne peut pas sentir facilement les processus épineux ; le dos devient plat et bien couvert ; la croupe est convexe et bien musclée ; un peu de graisse peut être sentie sur le cou, la base du cou et la région des épaules ; le cou « comble » les épaules ; les crochets (tubérosité coxale) de la hanche sont à peine visibles.
– un âne gros : le dos est plat : on ne peut pas sentir les processus épineux ; les crochets (tubérosité coxale) de la hanche sont à peine visibles ; graisse sur le cou et la région des épaules, s’étendant sur les côtes ; les flancs sont comblés, le cou est épais.
L’âne gros semble bien « couvert » avec le corps arrondi avec de la graisse ; les os sont non apparents ; les flancs sont « comblés » ; le dos est large. L’âne très (trop) gros a ses os enfouis dans la graisse, le dos large ou plat ; dans certains cas, il a la présence d’un pli le long de la colonne vertébrale, une grande accumulation de graisse sur le cou, sur la région des épaules et sur les côtes. Le flanc est rempli de graisse.
Une fois analysé l’état corporel général, la formation a consisté à expliquer la liste des vérifications quotidiennes, simples mais indispensables. Avec l’expérience et la volonté de bien observer, les vérifications peuvent être rapidement exécutées. Lors de doutes ou d’anomalies constatées, un examen plus précis demande un peu plus de formation et d’expérience.
Au cours de la formation, l’aspect pratique a été abordé, en particulier au Refuge, en présence des ânes : évaluation générale mais aussi examens plus précis : pouls, fréquence respiratoire, température, examen d’un pied, examen de la peau…
Exemple : on peut prendre le pouls d’un âne au milieu de la mandibule inférieure et à mi-longueur de celle-ci. On peut compter les mouvements respiratoires à l’œil en se plaçant en oblique et à l’arrière de l’âne ou bien par positionnement de la paume de la main sur les naseaux.
Rappel des paramètres Adultes :
- Température : 36,5 à 37,7° – Moyenne : 37,1
- Pouls : 31 à 58/min. – Moyenne : 41
- Respiratoire : 13 à 21/min. – Moyenne : 20
À l’ADADA, des fiches de consignation où les observations individuelles doivent être remplies par les soigneurs.
Les formateurs rappellent la liste de vérifications à faire quotidiennement :
1- Comportement : Il est très important de reconnaître un changement de comportement. Un âne en bonne santé doit être alerte et réactif avec les oreilles pointées. C’est son endurance et son stoïcisme qui peuvent mettre en danger sa vie, car il est difficile de détecter des signes de maladie.
Y a-t-il des changements, s’isole-t-il de ses amis ?
Un âne alerte a la tête haute avec les oreilles qui bougent tout le temps. S’il la porte plus basse que normal, avec moins de mobilité. Il faut s’inquiéter.
2- Boiteries et mobilisation : Des ânes sains doivent pouvoir se lever, se coucher et marcher à l’aise sans boiter. Ce qui n’est pas normal pour un âne, c’est de rester allongé ou couché longtemps.
3- L’appétit et soif : Tout changement d’habitude doit alerter : une perte d’appétit, par exemple. Peut-il mâcher et boire facilement et avaler l’eau. Utilisez les seaux d’eau pour le contrôle de sa consommation. Une mauvaise haleine pourra être un signe de mauvaise santé. Bave-t-il ? A-t-il un écoulement nasal ?
4- Les crottins et l’urine : Des changements de textures peuvent vous indiquer qu’il y a un problème. Peut-être trop de pâturage. Les crottins normaux forment des boules bien rondes et se brisent facilement.
L’urine doit s’écouler aisément et sans forcer. Les ânesses en chaleur urinent plus souvent.
5- Les yeux et les narines : Yeux propres et lumineux, narines ouvertes et sans écoulement. En cas d’écoulement nasal jaunâtre/verdâtre ou crémeux, consultez un véto immédiatement.
6- La respiration au repos : Un changement est une source d’inquiétude MAIS rappelez-vous que le stress ou l’excitation peuvent augmenter la respiration. La température, la respiration et le pouls. sont différents entre les ânes et les chevaux.
7- Condition de la peau et la robe : Propre. Pas de signes de prurit. Pas de plaque sans poil, blessures ou plaies ou bosses ?
8- Évaluation du corps : Perd-il du poids en dépit d’un bon appétit et d’une absence de problèmes dentaires. Le meilleur moment pour vérifier l’état de son corps est le brossage. Ils adorent être brossés. Chercher les bosses et les plaques qui se cachent dans sa robe poilue et épaisse et qui peuvent être très douloureuses. En vieillissant, il trouvera le brossage plus difficile.
Ce qui est indispensable pour l’organisation d’une structure comme l’ADADA est utile à chacun d’entre nous, propriétaires d’ânes. C’est simple et efficace. Un dernier rappel en ce qui concerne l’obésité sur laquelle nos amis Anglais ont insisté, avec en particulier les conséquences sur les fourbures : au Donkey, ils utilisent beaucoup de paille d’orge à la place du foin. Ils préconisent pour le foin une quantité de 1,5 % du poids du corps en dose quotidienne.
Asinement vôtre
Jacques ROSET