Des filtres pour les oreilles
Mon ânesse était agressée par une nuée de moucherons en cette fin de février 2009 qui envahissaient ses oreilles. Il faisait beau, c’était la première journée ensoleillée de cet hiver humide et long. Je la laissais pâturer sur une bande enherbée le long du ruisseau bordant mon terrain ; elle agitait la tête pour chasser cette nuée et j’étais étonné de la précocité et de la soudaineté d’apparition de ces insectes. En voulant la soulager, j’ai introduit mes doigts dans son conduit auditif et à ma grande stupeur mes doigts furent couverts de sang.
Ces infestations d’insectes deviennent systématiques chaque année, et les ânes et les chevaux sont tellement agacés qu’il est difficile de leur demander un travail précis. Un cavalier de dressage ne pourra rien tirer de son cheval si des moucherons agressent les oreilles de sa monture. Beaucoup de mes clients (je suis maréchal-ferrant) ont adopté le bonnet ou carrément le masque pour que leur cheval pâture au pré en toute quiétude. Les selleries vendent beaucoup de bonnets tellement ce phénomène se généralise. Les produits vétérinaires sont inefficaces et les répulsifs ne durent pas longtemps. Pour nos ânes, il n’existe pas de bonnet à leur taille, et je ne sais pas si nos anciens ont conservé les bonnets d’ânes des cancres de leur école communale. Les couturières, à vos mètres et ciseaux pour confectionner des bonnets ! Après les pantalons des ânes du Cotentin, bientôt les tailleurs anglais confectionneront des costumes sur mesure pour nos ânes !
Si parmi les relations de l’ADADA quelqu’un connaissait un entomologiste pour identifier ce moucheron et préciser ses cycles et lieux de reproduction, nous pourrions trouver une stratégie de lutte contre cette « plaie » (d’Égypte). L’hiver ils disparaissent, où sont-ils et sous quelle forme ?
Des ânes confits
Nos ânes mangent trop. La nature a construit une symbiose entre le règne végétal et l’animal qui subit les influences des saisons. Il y a la belle et la mauvaise saison, la végétation prospère et ensuite se met au repos. Les animaux ont la faculté de stocker des réserves pour affronter la mauvaise saison, lorsqu’il faut lutter contre le froid et la raréfaction de nourriture, c’est une adaptation et c’est la vie. Les animaux sauvages font « l’accordéon » : ils grossissent et maigrissent durant tout l’hiver, leur graisse est renouvelée chaque année. L’être humain s’est affranchi de la nature avec des vêtements adaptés et des maisons chauffées l’hiver, et surtout une alimentation en quantité et qualité suffisantes toute l’année. Heureusement que les religions ont instauré un jeûne rituel (ramadan ou carême) qui rappelle à l’humanité que l’abstinence de nourriture est quelquefois salutaire… L’écureuil fait des réserves et stocke des noisettes pour affronter des temps très durs, il ne devrait pas dépendre de la « banque populaire » pour sa survie.
Nos ânes, avec la graisse accumulée avec l’herbe d’été, devraient affronter l’hiver en bonne santé, avec un foin de qualité mais moins riche que l’herbe fraîche.
Les compléments doivent être symboliques et assimilés à des friandises pour entretenir le moral.
Yves Duclos,
Maréchal-ferrant.