Qui est le dentiste équin ?
C’est en tout premier lieu un passionné, un passionné par son métier, pour qui l’amour des équidés prend le pas sur son existence toute entière. On ne devient pas dentiste équin par hasard. Ces dernières années, le métier tend à améliorer la mauvaise réputation de « casseur de dents » que l’on a bien voulu lui attribuer.
Aujourd’hui les méthodes ont changé, le matériel a évolué, des formations professionnelles ont ouvert leurs portes : le métier se professionnalise. Vous allez me dire : « Et les vétérinaires alors, ne sont-ils pas là pour vérifier la dentition de nos amis pendant la visite annuelle ? » Oui bien sûr, ils sont là pour ça, entre autres ; cependant, vous pourrez facilement apprécier les compétences d’un spécialiste en la matière qui y consacre ses journées entières, et qui, par conséquent, est équipé de matériel performant, adapté à chaque type de soin, pour un meilleur confort de l’animal.
Tous les équidés ont besoin d’être suivis au niveau de la dentition de manière annuelle. À l’inverse des humains (brachyodontes), les équidés sont hypsodontes, c’est à dire que leurs dents, pour compenser une usure due à la mastication (normalement 14 h/16 h) poussent de manière continue tout au long de leur vie.
Les dents ne sont jamais entières du sommet de la couronne à l’apex de la racine. Lorsque l’équilibre « mastication (usure) / croissance de la dent » est préservé, les problèmes sont limités. Cependant même un équidé au pré toute l’année nécessite une visite de contrôle.
Observez ce schéma : les tables dentaires présentent un angle d’environ 10 à 15° par rapport à l’horizontale et la mâchoire inférieure est plus étroite que la mâchoire superieure, ainsi pendant des temps de repos ou un mouvement masticatoire irrégulier, la couronne de la dent à tendance a pousser dans l’espace laissé vide, ainsi l’on voit apparaître sur la face externe de la mâchoire et sur la face interne de la mâchoire inferieure des pointes d’émail très dures et très saillantes qui peuvent provoquer de graves troubles de la digestion et de la posture.
Quelles sont les pathologies dentaires ?
La pathologie dentaire la plus courante est la surdent. On en retrouve irrégulièrement tout au long des arcades dentaires. Elle est bénigne lorsqu’elle est suivie annuellement et un simple nivellement dentaire suffit à retablir une bonne occlusion et à éviter plaies, coliques et amaigrissement.
Mais il existe toute une panoplie de pathologies dentaires que les propriétaires d’équidés se doivent de connaître et de reconnaître pour être conscients de la nécessité des soins dentaires.
On les classe en plusieurs catégories :
Les pathologies des incisives
Elles sont très faciles à repérer, il vous suffit d’écarter les deux lèvres de l’animal pour laisser apparaître les incisives.
Plusieurs cas :
L’animal présente un sourire, signe que l’angle des tables dentaires est trop plat (<10°). Le mouvement masticatoire est faussé, les forces exercées sur la mâchoire sont mal réparties, l’animal souffre et son articulation temporomandibulaire (ATM) est atteinte. Cela engendre de fortes modifications de la posture avec des répercussions importantes sur le squelette.
L’animal présente un sourire inversé. Signe que l’angle des tables dentaires est trop important (>15°). Le mouvement masticatoire demande une forte ouverture de la bouche, les pointes d’émail (surdents) sont particulièrement nombreuses et saillantes. L’animal risque de fortes blessures intrabuccales, des troubles de la digestion, des défauts de posture.
La ligne entre les incisives est droite mais pas horizontale et la mandibule est décalée à droite. La mastication est presque impossible, et l’animal ne mastique généralement que d’un seul côté. Les arcades dentaires gauches présentent un angle trop fort et les arcades droites au contraire sont presque à 0°. Cette pathologie implique de nombreux troubles infra-buccaux avec des surdents, parfois des plaies, des sensibilités au niveau de I’ATM et peut avoir de graves conséquences sur la santé de l’animal.
Les pathologies des molaires
Ces pathologies sont nombreuses et généralement la cause première des pathologies des incisives.
Il faut savoir que les équidés ont des dents de lait (ce qui n’est pas acquis par tout le monde) et celles-ci sont souvent à l’origine des problèmes.
L’âne, comme le cheval, possède trois incisives par demi-arcade (pince, mitoyenne, coin). Ces incisives ont une première phase déciduale, Ensuite vient le crochet (chez les mâles en général), qui lui pousse tranquillement vers 4 ans et demi – 5 ans en une seule phase définitive. Puis l’on rencontre 3 prémolaires et 3 molaires. Les molaires poussent à partir de 2 ans pour être définitives, les prémolaires chuteront vers deux ans et demi, 3 ans et demi, et 4 ans et demi, pour ensuite seulement devenir définitives. Souvent il arrive que deux prémolaires antagonistes ne chutent pas en même temps, la dent définitive la plus précoce prend donc sa place dans la bouche et continue à pousser dans l’espace antagoniste laissé vide par la dent tardive. Ainsi on se retrouve avec une dent plus longue que les autres, qui va empêcher l’antagoniste de pousser à son tour et qui va obstruer le mouvement masticatoire : on l’appelle « dominance » ; en antagoniste on aura une « dépression ». Ce phénomène se produit également lors de la pousse des molaires. Une dent manquante ou une dent surnuméraire sans antagoniste réagira de la même manière.
L’apparition de dominantes et de dépressions peut également être due à la mauvaise qualité d’une dent.
Ainsi on retrouve plusieurs grands types de pathologies :
Il empêche le mouvement antéro-postérieur de la mâchoire, ce qui perturbe évidemment la fonction de mastication. En fond de bouche, il est particulièrement dangereux car peu accessible, le traitement en est d’autant plus compliqué.
Le mouvement antéro-postérieur de la mâchoire est là aussi perturbé. On peut cependant repérer cette pathologie d’un simple coup d’œil.
Rampe
La rampe est fréquente, elle se forme sur les premières prémolaires. On peut là aussi la repérer facilement.
Petite dent parasite, la dent de loup apparaît vers deux ans chez 80 % des équidés sur les barres supérieures ou/et inférieures (dent de cochon), juste en avant de la première prémolaire. Cette dent ne pousse pas de manière continue mais devient gênante lorsqu’il faut mettre un mors dans la bouche. Le mors vient s’appuyer exactement à l’emplacement de cette dent et la rend mobile et très douloureuse. Elle est la cause de nombreux désaccords entre le cavalier et sa monture. Elle est donc à extraire.
Dentition en vague / dentition en scie
Il existe de nombreux autres types de pathologies que nous ne détaillerons pas. Dans les affections plus générales de la bouche, on trouvera les affections périodontales, les fractures, les caries, les aphtes, le tartre, les malformations…
Comment suspecter un problème dentaire ?
Evidemment les conséquences ne sont pas des moindres et toute personne qui a déjà eu mal aux dents sait que cela lui a procuré des douleurs diverses : non seulement la douleur du problème dentaire, mais aussi des problèmes d’alimentation et des douleurs dans la nuque, le dos, voire les jambes.
Pour les équidés les conséquences sont aussi graves, et circonstance non atténuante, ce sont des êtres vivants particulièrement fragiles et qui n’ont malheureusement pas la parole.
Il faut donc être attentif a tous les signes extérieurs pour suspecter la pathologie dentaire :
- difficultés à manger : perd de la nourriture, met du temps à finir sa ration, salive beaucoup, crottins contenant des céréales entières, perte de poids…
- difficultés à monter ou à mener : il bat à la main, a du mal à tourner, porte sa tête de travers, change de pied au galop, saute à gauche, prend le galop, s’arrête à l’obstacle…
- tendance à faire des coliques
- baisse de performance
- salivation excessive
- problèmes respiratoires
- écoulement nasal
- protubérance au niveau de l’auge
- problèmes de dos
- haleine forte, etc.
Restez à l’écoute de vos animaux et n’hésitez pas à regarder ce qui se passe à l’intérieur.
Une fois les problèmes trop importants, il faudra des années de traitement à votre compagnon pour récupérer la totalité de son occlusion et parfois, il est même définitivement trop tard.
En espérant avoir apporté des informations supplémentaires à tous les propriétaires d’équidés qui se battent pour le bien-être de nos amis les équidés.
Dorothée Echevin, Dentiste équin. 04 37 02 25 00 – 06 03 07 36 37
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