Le jeudi 2 octobre 2014, j’ai participé à la visite à AMBERT d’une vétérinaire du Donkey Sanctuary de SIDMOUTH (G.B), Karen RICKARDS. Cette visite, programmée après une rencontre des responsables anglais avec notre Présidente, avait pour but d’apporter une expertise extérieure du fonctionnement général de notre parc ânier de 300 ânes, d’examiner plusieurs cas d’ânes à problèmes et d’apporter des conseils de soins de la part de cette spécialiste qui, comme ses confrères du Donkey Sanctuary, a en principe une expérience unique concernant les ânes puisqu’elle ne s’occupe que de nos amis les ânes et avec des moyens très sophistiqués.
Je m’étais rendu à SIDMOUTH il y a quelques années et j’avais pu constater les moyens exceptionnels que ce centre unique dans le monde, possède, avec un parc de plus de 2 000 ânes. J’étais accompagné en outre de Marinette et d’Etienne, de ma secrétaire personnelle Françoise (ma femme) et de mon interprète privée Géraldine (ma belle sœur)… Une équipe de choc. Malgré cela, je reconnais avoir eu quelques difficultés, surtout au début, de compréhension.
Malgré tout, nous avions pu échanger sur le fonctionnement général de la conduite de notre parc de 300 ânes, soins, nourriture… et examiner une quinzaine de cas répertoriés auparavant dans nos différents parcs, essentiellement d’ânes arrivés porteurs de séquelles de mauvais traitements, d’accidents, d’insuffisance de soins, etc… ce qui est notre vocation première et sensiblement différent du Donkey Sanctuary où les ânes restent à demeure pour y finir leurs jours.
Examen des cas individuels (le tour des parcs)
Marinette et Etienne avaient sélectionné les cas les plus lourds et les plus représentatifs de cas rencontrés lors d’arrivée à l’ADADA, d’ânes en grande difficulté physique. J’ai classé en différents groupes la quinzaine d’ânes examinés, porteurs de problèmes.
1- Groupe des ânes à difficultés locomotrices
Dans ce groupe, j’ai rassemblé tous les cas de malformations, d’arthroses, de séquelles de fourbure, de rétractations tendineuses ou de blessures accidentelles. Les diagnostics ont été toujours difficiles surtout que les prescriptions de Karen RICKARDS concernent des moyens diagnostiques dont elle a la facilité d’utiliser sur place au Donkey Sanctuary, par rapport à nos moyens qui nous obligent à déplacer les malades jusqu’à Clermont-Ferrand pour des examens poussés et spécifiques, ce qui limite leur utilisation.
Nous avons donc essentiellement discuté sur des préconisations d’anti-inflammatoires et anti-douleurs sans que l’on puisse éclaircir complètement l’utilisation la plus judicieuse entre les deux types de médicaments. La consoeur a beaucoup parlé de l’utilisation de la phenylbutazone qui est un anti-inflammatoire mais qui par son action a automatiquement un rôle anti-douleur sans être un sédatif de première intention. Parmi les anti-inflammatoires, même si je vous envoie toujours vers vos vétérinaires respectifs, je peux citer certains qui ont un bon rôle anti-douleur comme l’Oedex ou l’Equiperlazone par voie orale ou encore le Naquadem injectable, tant qu’il sera commercialisé et que j’ai souvent prescrit car il a en même temps un rôle diurétique souvent utile pour traiter les cas où un œdème est présent. Si l’on veut traiter uniquement la douleur, on trouve le Quadrisol et le Vedaprofène par voie orale. N’oublions pas qu’un traitement anti-douleur peut dans certains cas être considéré comme curatif car en apaisant la douleur, il permet à l’âne de ne pas réagir à contre sens.
Bien sûr à l’occasion d’examens des ânes que j’ai classé dans ce groupe, il a été beaucoup question de maréchalerie indispensable pour les soins des animaux en difficultés locomotrices mais aussi dans la prévention et d’indispensable entretien des pieds que l’ADADA effectue régulièrement même si nous n’avons pas de maréchaux permanents comme c’est le cas au Donkey Sanctuary.
2- Groupe des ânes à mauvais état général
C’est dans ce groupe que l’on trouve de nombreux ânes récupérés souvent maltraités, mal nourris et dépourvus d’un minimum de soins. Pour ces animaux, Karen RICKARDS a le réflexe immédiat à juste raison de pratiquer un examen dentaire. D’ailleurs, ma consoeur anglaise a dans sa sacoche outre son stéthoscope un « ouvre-gueule » ou pas « pas d’âne », bien adapté qu’elle utilise systématiquement. Il est vrai que si l’examen des pieds est, en principe, plus répandu, l’examen dentaire est peu pratiqué par les propriétaires. Et pourtant, c’est un examen auquel on devrait penser essentiellement sur tous les ânes à partir de l’âge de 20 ans. L’ADADA fait appel à deux dentistes régulièrement et systématiquement à chaque entrée.
Nous avons évoqué les vermifugations sans qu’elle nous apporte d’éléments supplémentaires à ce que pratique l’ADADA. Nous avons échangé sur la myopathie atypique que nous avons eu à combattre mais pas mal d’incompréhensions ne me permet pas de tirer quelque préconisation de sa part. Sur les ânes de l’ADADA, il est pratiqué l’administration de Selenium-Vit E pour essayer d’éviter l’apparition de cas.
Pour les animaux amaigris, je ne pense pas que Karen ait enregistré que des compléments orge aplatie, granules… sont apportés par nos soins.
3- Cas particuliers
Ce sont les ânes hélas trop nombreux atteints de sarcoïdose. Au Donkey Sanctuary, Karen nous a clairement dit qu’ils pratiquent l’ablation chirurgicale le plus précocement possible, avec un maximum de trois opérations sur le même sujet. En cas d’échec, l’euthanasie est systématique car ils considèrent qu’il y a un risque de contamination avéré.
Une discussion s’est instaurée sur l’origine des sarcoïdes, la contamination par les insectes (mouches, moustiques…). J’en suis resté en ce qui me concerne sur le fait qu’il y a encore plusieurs hypothèses dans l’épidémiologie. Compte-tenu du grand nombre d’ânes présents au Donkey Sanctuary, ils ont pris le parti de la prévention maximum. Par contre lors de la prolifération successive sur le même animal, doit se poser la question de la souffrance et du recours à l’euthanasie.
Quelques cas très particuliers ont été examinés comme une calcinose circonscrite sur une ânesse de 15 ans à laquelle l’ADADA a pratiqué des soins d’aide au relevage par médecine douce (acupuncture) et qui maintenant n’a besoin d’aide que quelques fois dans l’année. Là, l’aide momentanée d’antalgiques a été préconisée. De même, nous nous sommes attardés sur le cas d’Eglantine qui pourrait avoir le syndrome de Cushing (excès de cortisone fabriqué par l’organisme) ce qui entraîne une diminution des défenses naturelles et rend l’animal réceptif à la moindre infection d’où l’apparition de plaies, abcès…
Conclusion
Même si la philosophie d’œuvrer pour sauver, soulager et guérir nos amis aux grandes oreilles est fondamentalement identique, nos moyens sont très différents, ainsi que la typologie des ânes en résidence permanente à SIDMOUTH ou à AMBERT. Les conditions de travail sont tellement peu comparables que certaines de leurs préconisations ne sont pas applicables. L’ADADA assure l’essentiel de ce qu’il faut faire là où d’autres renonceraient. Le rapport des Services Vétérinaires du 19 Juin 2014 est élogieux. Cela n’exclut pas que nous ayons à apprendre de ces spécialités du Donkey Sanctuary en adaptant leurs conseils à nos moyens, à la typologie de nos ânes et à leur environnement.
Un partenariat éventuel au niveau de la formation de nos intervenants peut être réfléchi… Affaire à suivre…
Asinement vôtre
Jacques ROSET