En France comme en Europe occidentale, l’âne est en train de susciter un intérêt nouveau notamment en tant qu’animal de compagnie.
De ce fait, l’exigence à la fois des propriétaires et celle de la recherche vétérinaire appelle à une meilleure connaissance de cet animal qui ne doit plus être considéré comme un petit cheval même s’il appartient aux équidés.
Les résultats obtenus permettent également dans les pays en développement d’améliorer le rapport homme/animal et de mieux soigner les ânes qui continuent à jouer un rôle important même si on ne bouleverse pas d’une manière très rapide des habitudes ancestrales.
I – Spécificités cardiorespiratoires de l’âne
Sur le plan cardiorespiratoire, si l’âne est sensible aux mêmes agents infectieux que le cheval, les signes cliniques ne sont pas toujours similaires.
Pour connaître les spécificités asines en la matière, des méthodes d’investigation ont été employées faisant appel à des examens complémentaires autres que l’examen général, comme l’auscultation par exemple ou l’examen visuel des voies respiratoires accessibles en simple consultation.
Je vais vous faire un résumé de ces méthodes et des résultats obtenus, suite à des publications de deux articles parus dans Pratique Vétérinaire Equine (n° 129 et 150)
a) Méthodes
Les tests utilisés font appel à des recherches sanguines en particulier des gaz sanguins artériels, à l’étude de la mécanique ventilatoire par mesure simultanée des pressions pleurales et des débits aériens grâce pour l’un de l’utilisation d’un cathéter œsophagien et l’autre d’un pneumotachographe ultrasonique. Également l’examen des voies respiratoires par endoscopie et le lavage trachéal ont permis de mieux connaître les capacités respiratoires et d’établir la formule leucocytaire trachéale.
En ce qui concerne l’endoscopie, les ânes sont tranquillisés et la xylocaïne est utilisée car l’âne a une forte sensibilité des voies respiratoires et a également une morphologie pharyngée différente de celle du cheval avec une configuration anatomique positionnant le pharynx plus en profondeur et plus incliné vers l’arrière.
Tous ces tests sont complétés par l’électrocardiogramme, l’échocardiographie et la radiographie du thorax.
b) Résultats
- Les paramètres en hématologie, mesure des gaz, échocardiographie et radiographie thoracique obtenus chez le cheval sont applicables chez l’âne.
- Sur le plan de la mécanique ventilatoire, les ânes sont moins performants que les chevaux, ce qui fait qu’ils doivent dépenser d’avantage d’énergie pour la ventilation d’un même volume d’air. L’âne est donc moins sportif que le cheval mais par contre il peut effectuer des efforts d’intensité faible à une moyenne qu’il peut soutenir sur une durée assez longue. Ce qui explique que dans la nature, leur survie n’est pas assurée par la fuite mais par l’immobilité.
- La fréquence cardiaque moyenne est plus élevée chez les ânes que chez les chevaux : 45 à 50 contre 35 à 40.
- La formule leucocytaire trachéale comprend un nombre plus élevé de cellules épithéliales, de neutrophiles et d’éosinophiles.
- Dans un ancien numéro, j’avais donné quelques indications sur un parasitisme pulmonaire particulièrement présent chez l’âne : la Dicotyocaulose ou Bronchite Vermineuse.
- Le test de lavage trachéal a pu montrer que l’âne semble capable d’éliminer les larves de dictyocaules sans modification de la formule leucocytaire bronchique. Lors de cohabitation « cheval/âne », le cheval peut être atteint de dictyocanlose s’il ne bénéficie pas de traitement antholmintique de la famille des avermectines.
Si le cheval présente des signes cliniques comme une toux chronique, l’âne ne présente généralement pas de signes mais élimine un nombre important de larves qui contaminent les chevaux. C’est l’occasion de vous rappeler qu’une vermigugation préventive est recommandée au moins deux fois par an à l’automne et au printemps.
II – Traitements médicaux du système respiratoire
Je me contenterai de quelques indications car trop d’erreurs peuvent être commises si l’ont veut jouer à l’apprenti sorcier. C’est le domaine de votre vétérinaire car le diagnostic différentiel des maladies doit être correctement établi par examen des signes cliniques : toux, jetage, essoufflement et auscultation accompagnée éventuellement d’examens complémentaires comme l’hématologie, les échantillonnages ou endoscopie.
- Dans la panoplie des médicaments, les antibiotiques doivent être réservés aux infections bactériennes sérieuses et lorsque les signes cliniques concordent pour que leur préconisation soit incontournable. Trop d’utilisations abusives ont conduit à développer des souches de bactéries résistantes.
- Citons aussi les antifongiques dans les cas de rhinites, sinusites fongibles, rares dans nos pays, mais pouvant se développer en milieu chaud et humide en présence de fourrages ou litières moisis.
- Les anti-inflammatoires doivent être utilisés en connaissance de cause. Par exemple, les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont utilisés dans le traitement symptomatique des affections virales respiratoires, mais sont inefficaces lors d’affection respiratoire de type chronique pour lesquelles on utilise des anti-inflammatoires stéroïdiens.
- Enfin dans certains cas, il sera bon d’associer aux anti-inflammatoires des bronchodilatateurs et mucolytiques ainsi que des diurétiques et également des stimulants de l’immunité.
Mais n’oublions jamais que le médicament ne sera vraiment actif que si l’âne est soigné dans des locaux où l’hygiène est respectée avec une bonne aération, sans pour autant de courants d’air, ainsi que des fourrages non poreux et non moisis. N’attendons pas la maladie pour prendre toutes les mesures de prophylaxie hygiénique accompagnées du respect du planning des vaccinations.
Trop souvent on oublie les dates de rappels – c’est l’occasion de vous renvoyer à d’autres articles, mais pour les nouveaux adhérents un résumé :
- Vaccination des ânons à 6-7 mois s’ils sont issus de mères vaccinées, à 2-3 mois si la mère n’a pas été correctement vaccinée.
- Rappel annuel sans trop s’écarter des dates indiquées
- Pour les affections respiratoires, vaccination grippe et éventuellement dans certaines régions où la maladie sévit : la Péripneumonie.
Jacques ROSET, vétérinaire